Ils mettent noir sur blanc, révèlent les balafres, exposent les tourments des hommes dans
les villes et les campagnes. Ils vont ensuite se poser sur un fil comme des oiseaux et se taisent.
Ma première rencontre avec eux fut la dernière et inoubliable. Je les aperçu au loin sur le
gazon du château de Valmy dans les Pyrénées-Orientales. Christophe Massé assis aux côtés
de Bernadette Lafont et Christian Riedeberger recroquevillé l'oeil dans l'oeil de la caméra.
Le soir même, ils me firent m'allonger une sur un divan. Christian arpentait la pièce en
vociférant à la manière de Tom Waits, tandis que Christophe affublé du costume de Rimbaud
collait sur ma poitrine des billets de banque en hurlant : "Eugène Delacroix numéro un !
Eugène Delacroix numéro deux !"
Ensuite, nous nous sommes saoulés.
Plusieurs jours après, les deux hommes étaient assis sous le platane de la source à
l'endroit même où débute pour le meilleur et des fois pour le pire, les grandes aventures.
Je leur fis un signe de la main, Christophe tourna la tête, son regard se perdit dans le ciel
céruléen, Christian venait de s'éclipser.