Au coeur de la vie et de l'oeuvre de Friedrich Hölderlin (1770-1843), du roman Hypérion à ses plus grands poèmes, se trouve la figure de celle qui s'impose comme l'incarnation même de sa poésie et qu'il surnomme Diotima, reprenant le nom de la mystérieuse prêtresse qui, dans le Banquet de Platon, enseigne à Socrate la nature de l'Amour.
Elle s'appelait Susette Gontard, était l'épouse d'un riche banquier, Jacob Gontard, qui engagea en 1795 Hölderlin comme précepteur de son fils aîné. Entre le poète âgé de vingt-cinq ans et la jeune femme qui, mère de quatre enfants, n'a qu'un an de plus que lui, naît une passion réciproque. Excédé par la liaison trop visible entre sa femme et son serviteur, le banquier pousse ce dernier à démissionner. Dès lors, les deux amants continueront d'échanger des lettres et de s'apercevoir en secret. Hölderlin ne cessera jamais d'aimer Susette dont la mort à trente-trois ans n'est pas étrangère à la folie dans laquelle il sombre en 1806.
Qui était Diotima ? Assez de lettres ont été conservées pour que nous puissions entendre sa voix. Les poèmes que Hölderlin lui a dédiés, publiés ici dans une nouvelle traduction, acquièrent un surcroît de sens de leur confrontation avec cette correspondance. Un ensemble de témoignages émanant de l'entourage achève de rendre ses traits véridiques à celle qui, aux yeux de la postérité, reste à jamais Diotima, une femme exceptionnelle, à la sensibilité vibrante.