Sylvie Germain est avant tout une prodigieuse conteuse dont l'écriture procède d'une nécessité vitale: aller «à la rencontre des autres qu'on porte en soi et qui y ont laissé des traces», donner existence aux fantômes et aux images qui viennent la visiter, mettre en scène et en fable les visions qui la sollicitent, animer la vaste fosse commune de sa mémoire et de sa crypte où reposent et se mêlent tout ce qu'elle a appris et oublié, le passé d'avant sa naissance comme celui des expériences qu'elle a connues, et toutes les vies imaginaires qui la traversent. C'est ainsi qu'elle tresse ses histoires, donne sens à un monde en proie au mal et au malheur, dessine des perspectives et entrevoit une lumière dans les nuits de ses romans.
Du Livre des Nuits à Magnus s'est ainsi édifié un univers de contes et de légendes qui est aussi un miroir tendu à la réalité de notre monde, tout en nous entraînant dans la magie de ses mots.
«Tous les personnages sont des dormeurs clandestins nourris de nos rêves et de nos pensées, eux-mêmes pétris dans le limon des mythes et des fables, dans l'épaisse rumeur du temps qui brasse les clameurs de l'Histoire et une myriade de voix singulières, plus ou moins confuses. Des dormeurs embués de nuit, pénétrés de chants lointains et de murmures, et tressaillant d'un désir de jour, de chants audibles, de langage intelligible.» (Sylvie Germain, Les Personnages)