Suivez le regard d'Ernst Bloch jusqu'à l'horizon et un peu au-delà, où se fomente l'avenir. Les Spuren sont bien des Traces mais surtout comme jalons plantés dans le gué, le sable ou la neige pour sonder, et flécher le parcours du troupeau humain chassé vers l'Histoire. L'auteur de L'Esprit de l'Utopie (1918) conte des histoires, des faits divers, des légendes (chinoises, hassidiques), anecdotes et souvenirs... Dans cette miniaturisation du tragique, il n'est rien qui ne soit trace d'une absence, celle de l'homme qui n'est pas encore - qui ne se cherche même pas encore. Ce bric-à-brac philosophique (imperméable à quiconque n'est pas fasciné par Munich ou Berlin des années 20), constamment déroutant, violences expressionnistes et chinoiseries allusives, est le plus dense entassement de signes jamais jeté sur la rive de l'Allemagne weimarienne : le tout-est-possible filtre par les fissures de la banalité. A nous d'essayer des recoupements.