Un coin de l'Entre-deux-Mers ou Étude de moeurs au XVIIe siècle en pays bordelais est l'un des ouvrages les plus curieux de Léo Drouyn. Publié en 1888 en assez peu d'exemplaires, il témoigne de l'engouement de plus en plus marqué de l'auteur pour les archives et les études historiques. Après les Variétés girondines qui exploraient l'Entre-deux-Mers dans sa partie « bazadaise », il revient en pays bordelais, dans l'archiprêtré d'Entre-deux-Mers et pour partie dans la prévôté du même nom, avec cette étude des paroisses de Dardenac, Daignac, Blésignac, Camiac et Faleyras.
Les archives privées auxquelles il a accès - il fait déposer celles des Fisson aux Archives départementales - lui apportent des éclairages saisissants sur les moeurs de la noblesse et du clergé au XVIIe siècle, époque très marquée, après les guerres de Religion, par les troubles de la Fronde, et ce faisant il rencontre et narre des épisodes dignes d'un roman :... un vieux Frondeur (Louis d'Aix), rentrant dans son château (Grossombre), guerroyant avec ses voisins et rencontrant dans un prêtre (Nolibois, curé d'Espiet) un adversaire digne de lui ; des membres d'une famille d'industriels devenant hauts et puissants seigneurs et donnant des hommes éminents à la magistrature et aux lettres (les Gaufreteau). un membre du Parlement (le président de La Vie) déshonorant une famille noble, soupçonné d'avoir fait assassiner le père et l'oncle de sa victime (Geoffroy et Joseph de La Chassaigne, soudans de
Pressac), et finissant pas se trouver maître de (leur) fortune presque entière... une famille de gentilshommes campagnards (les Fisson) en butte aux exigences du fisc... leur fille enlevée par un voisin... dévastant les terres des amis et parents de la demoiselle...
Quels romans on pourrait monter avec ces personnages et ces événements ! écrit Léo Drouyn dans l'Avant-propos de cet ouvrage... Tout ce que j'aurai à raconter s'est produit dans les étroites limites des paroisses nommées ; pas un trait du tableau qui ne soit pris aux pièces composant les archives de quelques familles nobles... Et il conclut : La région où se passe mon histoire occupe la partie la plus pittoresque de l'Entre-deux-Mers.
Illustré de 14 gravures, cet ouvrage, très fidèlement transcrit, est une lecture indispensable à la bonne connaissance de l'oeuvre de Léo Drouyn, comme à celle de l'histoire de notre région.