Cette collection d'essais écrits par Maurice Garden au fil des années permet d'entrer dans la fabrique de l'historien. Véritables travaux pratiques d'histoire sociale, ces textes montrent comment utiliser, ou détourner, des sources traditionnelles et comment faire parler des documents improbables. La ville est le lieu des enquêtes ici réunies. Elles questionnent la porosité des hiérarchies sociales, détectant les frontières invisibles au coeur des groupes apparemment les mieux constitués. Elles pénètrent les réseaux et les solidarités qui les traversent tant dans l'hétérogénéité des groupes professionnels que dans les migrations génératrices de la croissance urbaine.
Les institutions d'éducation et de santé analysées le sont avec la volonté de traiter dans leur complexité tous les acteurs de ces mondes, y compris les usagers. S'agissant de la médecine, les derniers essais cherchent à révéler les débats des milieux « savants » et « populaires » autour de l'introduction des nouvelles médecines, comme l'homéopathie et les médecines « naturelles ».
Au total, cet ensemble de textes révèle des manières de travailler très actuelles : celles de l'historien qui construit son objet d'étude à partir de plusieurs angles de vue, aussi attentif à toutes les catégories sociales qu'au genre, et qui fait varier systématiquement les échelles. Les relire aujourd'hui est une manière de faire de la théorie par la pratique en entrant dans l'analyse concrète et multidimensionnelle des sources. Ces dernières permettent de réfléchir aux moyens de saisir tout à la fois la cohérence et les fractures internes aux groupes et la diversité des individus. Ce qui est, en soi, un programme plus que jamais actuel.