Un roman pour le Roi : Gargantua
Que n'a-t-on pas dit sur Rabelais depuis le XVIe siècle ? Fut-il un « Eschyle de la mangeaille » (Victor Hugo) ou « le pourceau des moines défroqués, se délectant dans sa bauge immonde et faisant rejaillir avec délices les éclaboussures de sa lie sur le visage, sur les moeurs et sur la langue de son siècle » (Lamartine) ? Son oeuvre est-elle « une énigme incompréhensible, inexplicable, une chimère, monstrueux assemblage d'une morale fine et ingénieuse et d'une sale corruption » (La Bruyère) que seules pouvaient goûter « quelques personnes d'un goût bizarre » (Voltaire), ou le fruit d'un « génie- mère » (Chateaubriand) « inventeur d'une France nouvelle » (Nodier) ? Certains le virent athée, occultiste, chantre de la liberté du peuple... Si Gargantua, roman ambigu, est capable de susciter certaines de ces lectures, il est avant tout un texte politique, pleinement inscrit dans la réalité de son temps. Il est aussi, par sa satire des travers de l'humanité, une oeuvre universelle.