Ce roman de mer, comme il y a des romans d'aventure ou des romans d'amour, est l'oeuvre d'un authentique Breton, amoureux de sa terre et de l'océan qui l'entoure. Nul folklorisme facile pourtant, nulle couleur locale trop insistante ou déplacée mais, simplement, la relation fidèle de tranches de vie d'un milieu professionnel qui a radicalement changé depuis l'époque décrite par le roman: celui des pêcheurs hauturiers. Dans Un royaume sous la mer un homme, Jean Modénou, patron du bateau Le Gamineur, est partagé entre sa vie en mer, rude, mais qu'il chérit plus que tout, et sa vie à terre, triste, sinon déprimante, aux côtés de son épouse Madeleine, née Le Stir, parfaite femme d'intérieur au caractère difficile et avec laquelle les sujets de mésentente sont nombreux. Les relations de ce couple forment la vraie trame du roman, sur laquelle vient se greffer la découverte par Jean Modénou et son équipage d'un banc de poissons d'une prodigieuse richesse, un «coin à pêche» localisé par hasard et qui donne bien vite lieu à toutes les convoitises. Celle entre autres du beau-frère du patron de pêche, Jos Le Stir, protégé par Madeleine, qui suscitera la trahison de l'un des membres de l'équipage de son mari. Par petites touches successives, à mesure qu'avance le récit, parfaitement structuré, l'univers des protagonistes se met en place, et l'on est alors embarqué dans le monde de Henri Queffélec, un monde âpre, dur à l'ouvrage, mais où les passions sont d'une violence qui n'a d'égal que celle de la mer quand elle se déchaîne.