Lorsque les Français débarquent à Sidi-Ferruch, en 1830, ils sont loin de se douter que cette terre inconnue à l'assaut de laquelle ils s'élancent va soulever des tourbillons de passions et devenir, 130 ans durant, l'un des enjeux majeurs de la politique nationale. Et d'abord, que faire d'un pays conquis sur un coup de tête et de dés ? D'un pays où, jusqu'en 1850, la maladie et les guerres dévorent des milliers d'hommes ? Il faut attendre 1870 pour que la formule « l'Algérie c'est la France » s'impose avec force. Les passions françaises y trouvent dès lors un écho exacerbé : Les Français y seront plus français que ceux de métropole, plus patriotes, plus généreux de leur sang ou, le cas échéant, plus antisémites qu'eux. Quant aux Arabo-Berbères, ils ont longtemps attendu, dans un silence brisé par des révoltes sporadiques. On les considérait comme de « grands enfants » assoupis, dominés par le fatalisme et incapables de « s'en sortir » à l'écart de la « mission civilisatrice » de la France. En 1954, le réveil n'en sera que plus brutal. Mais dès 1940, l'Algérie française est morte. Un pays vaincu ne peut plus être une puissance coloniale dans un monde balayé par un mouvement général d'émancipation.
Pierre Darmon a croisé les sources, multiplié les points de vue, allié l'analyse de fond économique et sociale au déroulement des événements et au récit des hommes et de la vie quotidienne avec ses bruits, ses couleurs et son atmosphère si particulière. Au fil des pages se dessinent ainsi tous les aspects d'une Algérie ardente et violente, injuste et séduisante, déchirée par les passions mais porteuse d'espérance, de mythes et d'amour.