Pour sa thèse qu'il exposa dès 1797, Gauss a fourni une démonstration - difficile et
topologiquement incomplète - du théorème qui affirme l'existence d'au moins une
racine complexe à tout polynôme réel non constant : tel se présente le théorème
fondamental de l'algèbre. Gauss ne supposait pas l'existence des entités qui avaient
été imaginées par Descartes pour permettre la décomposition de tout polynôme en
facteurs du premier degré. En 1795, Laplace avait en effet rigoureusement démontré
que ces «imaginaires», une fois supposés, se réduisaient aux nombres complexes,
lesquels accaparaient le nom de «quantités imaginaires». Une dizaine d'années
après, Argand fournissait une démonstration aisée du théorème fondamental. Des
démonstrations inventives différentes se succédèrent, de Gauss encore, de Cauchy,
de Liouville, etc., et trouvèrent une place variable dans les grands traités classiques
des mathématiques européennes jusqu'à la fin du XIXe siècle, où l'analyse réelle
restait séparée de l'analyse complexe.
C'est cette période d'un siècle que le présent volume inventorie, donnant à lire en
français les textes correspondants, explicitant le contexte intellectuel des preuves,
mais réservant pour un prochain et dernier volume les explications algébriques à la
façon de Galois et les preuves données au XXe siècle.