Ce livre reproduit une grande part des carnets que le poète André du Bouchet tint presque quotidiennement entre 1949 et 1955. Après les années de formation intellectuelle et d'exil que furent celles de sa vie aux États-Unis, du Bouchet découvre, au cours de cette période d'intense création poétique, dans la proximité de Ponge et de Reverdy, ce qui deviendra sa propre voix.
« Pendant la lueur qui précède la chute du sommeil, je déchiffre le mur. Tout s'aligne en filigrane, comme dans les dessins de Giacometti. L'ombre noueuse d'un arbre qui se ramifie, sous les moulures, la barre d'un verrou énorme coupant les croisées noires, portant des agrès, des cordages, remuant dans le flot qui baisse chaque fois qu'une fenêtre opposée s'éteint. La noirceur de tous les ustensiles nocturnes par contre s'accentue. Le verre accroche des lueurs. Tous les éléments du jour vus dans leur silence, leur calme diaphane. Sans ce fourmillement strident. »
André du Bouchet, Cahier noir, Octobre 1951.