Des histoires brèves qui accueillent aussi bien le fantastique que l’onirisme ou la pure bouffonnerie, des histoires d’une facture impeccable qui, dans un climat d’inquiétante étrangeté, mettent en scène une humanité partagée entre la bassesse des bourgeois et l’élévation des rêveurs, des histoires qui cherchent d’abord à soumettre le lecteur à une surprise ou à un choc : tels sont bien les Contes cruels de Villiers de l’Isle-Adam dont cette anthologie offre l’image fidèle en présentant des textes qui relèvent de la nouvelle et du poème en prose, de la fantaisie littéraire et de la chronique.
Dans ces pages que l’écrivain rassemble en 1883, la disparate est ainsi érigée en système pour placer sous nos yeux un monde délibérément fragmenté où se font entendre des voix discordantes. Mais si une unité se dégage finalement du recueil, c’est dans l’ironie de Villiers qu’il faut la chercher. La morosité de l’écrivain témoigne d’une crise des valeurs et du regret d’une sacralité perdue, et ses contes peuvent se lire comme de violentes satires des mœurs contemporaines. Ce qui se renouvelle ici, ce n’est rien d’autre que la cruauté en littérature.
Edition de Pierre Glaudes.