D'entrée de jeu, comme le souligne Adriaan Verhulst, se pose le problème des origines et de la formation du village, entendu comme un ensemble fonctionnel et communautaire, et non comme la simple juxtaposition géographique de bâtiments d'exploitation et de maisons rurales. Faut-il, en l'absence de sources écrites, attendre le Xè siècle pour voir naître un village stable, avec un terroir ordonné et articulé ? ou plutôt anticiper, en étant sensible au « frémissement » carolingien ? Problème d'origine donc, mais aussi de lien avec le cadre des paroisses, avec le château ou la motte. Rien, ou presque, n'est définitivement acquis. Mieux vaut, par modestie, s'intéresser à des cas concrets, à des régions restreintes, bien éclairées par un faisceau de sources : les husun de la marche supérieure d'Al-Andalus, les casaux et les bastides de Gascogne, les villages du Nord ou du diocèse de Coutances. On y voit vivre les villageois, périr ou se développer leur milieu de vie, s'épanouir les convivialités ou les violences quotidiennes. On y voit surtout une diversité extrême, qui oblige à refuser toute synthèse globalisante, toute généralisation hâtive. D'autant que les historiens des textes ne peuvent se passer de l'archéologie et d'une iconographie bien comprise. Elle seule restitue le cadre de la maison, la quotidienneté des villageois dans leur labeur et les liens étroits qu'ils entretiennent avec la terre.