Le rapport privilégié que la religion entretiendrait avec la violence est devenu l’un des poncifs du débat public. En proie au djihadisme et au radicalisme politique du christianisme évangélique, l’Afrique semble être un cas d’espèce. Mais cette pseudo-évidence soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. De quelle violence, de quelles religions, et même de quelle Afrique parle-t-on ? La guerre, en Afrique, a été politique, et non pas religieuse. Elle a eu pour objet le contrôle de l’état et des ressources, plutôt que celui des âmes, même si elle a pu emprunter, ici ou là, le langage de Dieu.
Le chassé-croisé de la violence et de la religion doit être analysé au cas par cas, à l’échelle des terroirs historiques. Aux antipodes des généralisations idéologiques apparaît alors un objet sociologique très circonscrit : des mouvements armés d’orientation religieuse qui participent d’obédiences diverses, aussi bien islamiques que chrétiennes, conduisent des insurrections sociales, mais occupent une place marginale dans les interactions entre Dieu et César. Au fil de cette réflexion, c’est toute l’histoire de l’état en Afrique qui apparaît sous un jour nouveau.