Volga
L'héritage de la modernité
Volga Matouchka, la « Petite Mère Volga », comme la désignent poèmes et chansons populaires, tient une place particulière dans le coeur des Russes. Se métamorphosant au fil de l'année, englacé l'hiver, libérant aux beaux jours, après une immense crue, une quantité de poissons s'apparentant à une véritable manne, ce fleuve a pu être considéré aussi impraticable que miraculeux.
Arrivés au pouvoir en 1917, les bolcheviks, soucieux de faire entrer leur pays dans la modernité, entreprirent d'aménager à grand renfort de plans aussi ambitieux que titanesques le grand fleuve. Cela semblait d'une grande simplicité : il suffisait de retenir l'eau au moment de la fonte des neiges puis de la relâcher en fonction des besoins. Mais les enjeux liés à la pêche, et particulièrement à la production du caviar, entrèrent rapidement en contradiction avec les autres activités fluviales (l'irrigation, la navigation et l'hydro-électricité), et l'aménagement fut très vite confronté à la fragilité des écosystèmes.
En quelques décennies, les dizaines d'instituts de recherche créés par le régime soviétique accumulèrent une somme gigantesque d'écrits, mais avançant des solutions largement divergentes. Si bien qu'en 1990, lorsque le régime s'effondra, les travaux n'étaient toujours pas terminés. Trente ans plus tard, après une longue pause qui n'a permis de trancher aucune polémique, ils sont en voie d'achèvement... dans un contexte radicalement nouveau.