La vulgarisation de la notion d'auteur de film,
tant du côté de la réception que de la production,
fait écran à une question que la critique, héritière
zélée de la Politique des auteurs mise en oeuvre par
les Cahiers du cinéma de jadis, ne pose plus, celle des
critères qui permettraient de distinguer, de même que
l'on distingue les écrivains des écrivants, les grands
cinéastes des réalisateurs et des tâcherons. Ceci ne
suffit pas à cela. Les critères d'appréciation étant
devenus plus culturalistes qu'esthétiques, ou alors
esthétisants, il n'est pas certain en bref que ceux que
l'on présente comme des auteurs et les auteurs eux-mêmes
soient de grands cinéastes.
On ne prend guère en compte la façon dont le film
fait sens au-delà de l'information, du discours, du
message. Il ne suffit pas d'effets de sens, il faut que le
spectateur soit mis en position de participer et même
de construire du sens. Des classiques aux modernes, le
cinéma a certes considérablement évolué : de nouveaux
genres sont apparus, le cinéma documentaire a
effectué des avancées et des mues essentielles, on n'est
pas auteur aujourd'hui comme on l'était à l'époque
des studios. Mais suffit-il d'être auteur ? Les critères
sont plus que jamais nécessaires pour distinguer ceux
des cinéastes qui sont, au même titre que les grands
écrivains et artistes, des créateurs.