Y a-t-il un parti intellectuel en France ?
«Il y des partis intellectuels qui ont de véritables
programmes», écrivait Charles Péguy en 1901. La
remarque garde aujourd'hui toute sa pertinence, n'en
déplaise à ceux qui déplorent la «fin» des intellectuels
dans le pays même qui a vu naître ce glorieux substantif.
Ce livre rappelle comment est née peu avant l'affaire
Dreyfus l'idée d'une «insurrection permanente des
Savants» au service de l'émancipation populaire. Il fait
le récit de ses succès et de ses échecs, de Lucien Herr
à Jean Cavaillès. Cette histoire n'avait jamais été
racontée. Mais il convenait d'observer aussi que la
leçon des normaliens socialistes n'a pas été perdue
pour leurs adversaires. Cette rivalité mimétique éclaire
d'autres courants intellectuels, de l'Action Française
aux «non-conformistes des années 1930». L'histoire se
répète parfois sur le mode parodique notait Marx. Celle
des intellectuels du demi-siècle écoulé n'a pas manqué
de le vérifier, rue d'Ulm ou ailleurs, avant qu'un parti
de la Restauration vienne, sans doute provisoirement,
occuper le devant de la scène politique et spirituelle.