Dans ce huitième tome de l'Histoire naturelle, générale et
particulière, daté de 1760, Buffon et Daubenton terminent de traiter
des animaux sauvages de France : hérisson, musaraigne, taupe,
chauves-souris, loir, lérot, muscardin et surmulot. Puis, suivant le plan
annoncé dès 1749, ils commencent à aborder les espèces étrangères.
Cependant la transition ne s'effectue pas brutalement, et un ensemble
d'animaux de statut géographique incertain ou intermédiaire rendent
le passage graduel : ainsi, le cochon d'Inde, animal importé du
Nouveau Monde mais devenu commun en Europe ; la marmotte et
l'ours, qui vivent sur les marges montagneuses du royaume ; et le
castor, présent en France mais dont les sociétés complexes ne
s'épanouissent pleinement que dans les grands espaces sauvages de
l'Amérique du Nord. Le volume s'achève avec trois espèces
indiscutablement exotiques : le raton, le coati et l'agouti.
Buffon, comme il l'a fait depuis le début de l'histoire des
quadrupèdes, saisit toutes les occasions qu'il peut pour rompre la
monotonie des descriptions et aborder des questions scientifiques ou
philosophiques plus générales. La «difformité» de la chauve-souris,
par exemple, lui permet de réaffirmer sa critique des causes finales et
des classifications linnéennes, fondées sur un petit nombre de critères
et totalement inapplicables dans le cas présent. De même, l'article sur
le castor offre matière à réflexion sur la nature de l'intelligence et des
sociétés animales, c'est-à-dire, au-delà, sur la singularité de l'homme.