Les Lettres, notes et carnets révèlent tout un pan de l'oeuvre
littéraire de Charles de Gaulle, très différent dans l'esprit et dans
la forme de ses ouvrages de réflexion et de souvenirs. Présentés
pour la première fois dans l'ordre chronologique et enrichis de
nombreux inédits, ces documents, réunis et publiés après sa mort
par son fils, l'amiral de Gaulle, relèvent d'une démarche plus
immédiate et spontanée. L'épistolier ou le diariste laisse apparaître
ici un de Gaulle que le mémorialiste s'interdit de montrer :
l'homme privé, le personnage en quelque sorte officieux, capable
de s'abandonner à un élan de tendresse comme d'exprimer sans
fioritures le fond de sa pensée. Hormis ses écrits de jeunesse, les
textes de ses conférences d'histoire prononcées en captivité puis
à Saint-Cyr et à l'École de guerre, ceux de ses allocutions devant
les officiers de son bataillon, quelques études sur les questions
de défense nationale et des résumés d'entretiens, l'essentiel des
Lettres, notes et carnets émane ainsi de plus de soixante années
de correspondance et de notations personnelles.
De 1907 au 9 novembre 1970, Charles de Gaulle a entretenu
avec ses proches ainsi qu'avec la plupart de ses interlocuteurs
politiques, français et étrangers, et quantité d'intellectuels,
d'artistes et d'écrivains une relation épistolaire d'une ampleur et
d'une richesse considérables.
Ses carnets, tenus depuis l'adolescence, constituent l'autre
volet de ses écrits intimes. Ils montrent comment l'homme, à
travers le temps, s'est construit, a forgé ses idées et inventé son
univers. «Pardonnez-moi ! Je n'aime que la France», y écrit
de Gaulle au lendemain de la Libération. Cet aveu suffirait à
résumer l'histoire de toute sa vie.
Jean-Luc Barré