Le 14 mars 1952, le truand Abel Danos, dit « le Mammouth », tombait sous les balles d'un peloton d'exécution dans les fossés du Fort de Montrouge en criant « Vive la France ! ». Un cri inattendu, puisque Danos avait été condamné à mort pour trahison. Avec cette condamnation, la France tournait une des pages les plus noires de son histoire : celle de la « Gestapo française de la rue Lauriston », dont le chef, Henri Lafont, avait lui-même été fusillé en compagnie de l'ex-policier Bonny quelques années plus tôt.
Le condamné avait contre lui un dossier des plus épais : outre ses trop nombreuses condamnations, ses évasions et sa participation au sanglant « premier hold-up de l'Occupation », il avait accumulé un lourd passif au sein de la « Carlingue » : opérations contre le maquis, pillage, meurtres. Les juges l'avaient condamné sans état d'âme en accordant toutefois « des circonstances atténuantes ».
Derrière le « tortionnaire », le « tueur à gages de la Gestapo » que la police, relayée par la presse, s'était acharnée à dépeindre, existait-il quelques éléments qui auraient pu faire pencher l'autre plateau de la balance ? Certains témoignages, en particulier celui de son ancienne maîtresse Hélène Maltat, affirmaient en effet que Danos s'était engagé, dès 1941, aux côtés du commissaire Blémant du contre-espionnage français, et qu'il avait appartenu au réseau Marco-Polo en 1944. L'affaire Danos n'était-elle pas aussi simple ? Après quatre ans de minutieuses recherches, Eric Guillon rouvre le dossier.
A travers l'histoire de Mammouth défile une galerie de personnages parmi les plus grands du banditisme français : Pierre Loutrel, dit « Pierrot le Fou », le « Grand » Jo Attia et Georges Boucheseiche, qui forment avec Danos l'ossature du redoutable « gang des tractions avant » ; le « Chauve » Jean Sartore, gestapiste décoré pour faits de Résistance, Raymond Naudy, l'ancien maquisard et tueur de gendarmes, Roger Lentz, l'associé de toutes ses cavales ; mais aussi « Mimile » Buisson, l'ami et le complice de la rue de la Victoire, qui le livra au commissaire Chenevier... Ou encore Auguste Ricord, Joseph Rocca Serra, André Jolivot, Jean Rossi, Charles Cazauba, Alex Villaplana et des dizaines d'autres figures d'un Milieu disparu.