Alcôves
Soins psychiques et architecture : de l'isolement à l'habiter C'est un nouvel enjeu pour la psychiatrie : l'architecture revisitée, considérée dans ce qu'elle a réellement à apporter au fait d'habiter, peut contribuer à la performance du soin psychique - la construction identitaire de l'être humain est toujours corollaire de ses modes de vie, sa construction psychique avec celle de son habitat. Il faut pour cela considérer l'institution comme un lieu voué à être habité, au sens large du terme. Cela relève d'une relation systémique entre patients, soignants, espaces en métamorphose, leur histoire et mémoire, un perpétuel vivier d'appropriations possibles.
Pour comprendre comment tout cela se noue, il nous faut tout d'abord revenir sur ce qui se passe lorsque nous « naissons au monde », comment nous apprenons ce que sont notre corps, notre conscience, et notre environnement, ce que signifie pour nous « je suis », puis « je suis ici » et enfin « c'est à ce lieu que j'appartiens », pour pouvoir dire « c'est là que j'ai envie d'être ». Car lorsque ce processus s'enraye, surviennent l'étrangeté et l'errance, le nomadisme domiciliaire, vécus par beaucoup de patients de psychiatrie, mais aussi par bien d'autres personnes qui ne sont pas connues des réseaux de soins.
Les Follies, exercice clinique du construire-ensemble, réunissant architectes, soignants et patients, ont été notre outil principal, en ce quelles ont reformulé, reconstitué au fur et à mesure leur propre corps, leur propre « moi » interne, leur regard à la fois intime et partagé sur leur capacité d'être, leur désir d'être, finalité de tout soin. La pratique architecturale a été ici constitutive, réparatrice.
Tout est à repenser, et à partir de là se déroule un enchaînement de conséquences et d'implications qui transformeront nos conceptions. Trois perspectives s'offrent à nous : l'amélioration des conditions d'hospitalisation des patients de psychiatrie dans leur environnement physique et l'optimisation de leurs chances thérapeutiques ; une meilleure compréhension des enjeux de l'habitat humain ; mais aussi un enrichissement des soins infirmiers et des pratiques architecturales.