Une évaluation critique
Dans cet ouvrage, le talent artistique de Kiefer n'est pas en cause. Il convient cependant de faire une évaluation critique de certaines oeuvres, de son interprétation du nazisme, de son esthétique, de ses choix religieux et de questionner sa fascination pour la mort. L'un des mérites de l'artiste est d'avoir interrogé l'histoire de la culture allemande et son implication dans l'idéologie germanique des nazis. L'importance de la poésie de Celan et Bachmann dans ses tableaux le conduit à relayer la mémoire de la Shoah.
Toutefois, Kiefer est un postmoderne réactionnaire, hostile aux avant-gardes artistiques et à la modernité liée à la philosophie des Lumières. Il réhabilite un art religieux en s'associant à la tradition renaissante de l'ut pictura poesis. Sa religiosité néo-romantique n'en fait pas un mystique, malgré ses nombreuses références à la mysticité et son goût de l'occulte, du mystère et du grandiose. Sa religiosité est conservatrice, amorale et apolitique. Sa traduction de la kabbale juive est anthropomorphe et dénature la transcendance du Dieu caché juif.
Sa conception de l'art, originale, est aussi mystificatrice en se présentant comme une théologie de la création artistique. Les aspects macabres de nombreux tableaux et installations exposent son oeuvre à une secrète glorification de la mort qui est une inversion fondamentale des valeurs de la vie.