"Quel est celui qu'on prend pour moi ?"
"Interrogé en mai 1981 lors de la victoire électorale de François Mitterrand, Aragon raconta longuement, tout émerveillé qu'il avait vu ce matin-là, dans le ciel de Paris, au-dessus des toits, un homme nu en deltaplane. La France regarda s'en aller Aragon un peu comme les amnésiques dans les films, regardent un objet ou un visage qui éveille quelque chose en eux - du moins on le croit un instant, on l'espère - et puis non : le regard de nouveau se lasse et retourne à l'indifférence. Trêve d'images. Ou bien, s'il en faut une, je choisis celle-ci : Aragon siégeant au Comité central du PCF écrit des vers. Tandis que se succèdent les interventions qu'il n'écoute pas, il note d'abord à droite de la feuille une liste de rimes possibles puis il compose. Voilà. Le mieux que puisse faire un écrivain, c'est encore d'écrire. Et moi, j'ai envie de lire par-dessus son épaule ;"