Les tickets de caisse sont-ils des poèmes emplis d'espoir ? Findus fait-il rêver à l'océan ? Bonduelle donne-t-il un sens à l'existence ? Nestlé adoucit-il les moeurs ? Et Yoplait rend-t-il à coup sûr le bonheur perdu ? Maria remplit sa vie comme un caddie, à toute allure et sans compter. Elle achète, passe son temps dans les magasins, comble ses vides avec des promotions...
Compenser plutôt que penser, ingurgiter plutôt qu'imaginer, et courir, courir, courir... Ah, elle est belle la vie top chrono ! Du moins tant que la machine ne déraille pas. Car il faut peu, si peu, pour se sentir comme un fond d'usine en faillite...
Deux euros. Deux minutes de vacances à Tahiti. Deux verres de Bordeaux. Deux sucres sans sucre dans mon café sans caféine.
Je l'ai dit à Viviane : tu dois te battre, ma fille. La victoire sur soi-même, c'est ce qui compte. Se battre. Personne ne va t'aider, personne n'aide personne, c'est comme ça : chacun pour soi. C'est la faute à personne. La société ne fait pas de cadeau, Viviane. Elle te pompe, te pressure, te jette quand t'as plus de jus. Solidarité, c'est qu'un mot, en réalité tu es toute seule et quand tu tombes, dix autres filles se pointent, Viviane, plus jeunes, plus intelligentes, plus performantes, plus belles... Plus minces. C'est comme ça.
Faut apprendre à aimer la lutte, aimer la compétition, tu verras, ça devient une drogue, une vraie drogue. Si tu t'arrêtes, si tu commences à réfléchir, à te plaindre, t'es foutue, Viviane, t'es morte. Le train ne s'arrête pas...