On a longtemps voulu cantonner l'Humanisme dans un seul espace, aussi vaste qu'il soit, et l'enfermer entre des parenthèses chronologiques. Mais l'Humanisme a des racines non seulement plus profondes et plus étendues, il a aussi de vigoureuses branches qui nous tendent leurs fruits jusqu'à aujourd'hui. De légitimes héritiers en somme.
Montrer cette permanence d'un vivant courant d'idées n'est pas le moindre tour de force de Gabriel Braeuner qui a puisé à toutes les sources, y compris les plus récentes, à l'appui d'une démonstration qui relève davantage du gai savoir, et de la joie de son partage, que d'une austère érudition figée dans ses certitudes.
C'est le deuxième tour de force de l'auteur : essayer de satisfaire les scientifiques sans restreindre son propos à une élite. Au gré d'une prose fluide et de courts chapitres bien calibrés, Gabriel Braeuner s'adresse au béotien auquel il rappelle l'essentiel tout en le mettant en perspective.
C'est à vrai dire aussi le double objectif de la Nouvelle Bibliothèque Humaniste : Rester un éden pour les chercheurs et devenir un paradis pour de nombreux visiteurs. Cela pourrait être le troisième tour de force de l'ouvrage. Montrer comment une petite ville, Sélestat, fut amenée à jouer dans la cour des grands ! Comment le trésor qu'elle recèle continue à justifier le fameux éloge d'Erasme.
Pour ce faire, Gabriel Braeuner qui, dans La Belle inconnue, a allègrement emboîté le pas de son illustre aîné, s'est vu merveilleusement épaulé par Dominique Pichard. Le photographe, qui a été en résidence dans la Bibliothèque humaniste, est un témoin privilégié et idéal de sa métamorphose. Son regard, décalé juste ce qu'il faut, contribue lui également à sa cure de jouvence. Allié à l'écriture vive de Gabriel Braeuner, le travail de Dominique Pichard, aussi minutieux qu'original et davantage en résonance qu'illustratif, apporte au livre un supplément d'ordre esthétique qui le rend assurément encore plus attractif.
Albert Strickler