¤ L'Hôtel du Nord de ces récits est l'hôtel
d'une ville restée « sans nom », d'un blanc de carte, d'une métropole sans
récit de fondation, d'une ville sans porte pour y entrer ni centre pour s'y
arrêter - seulement un gigantesque hôpital. C'est l'hôtel d'une ville de
100 000 habitants, table rase éreintée, partie de la ville-port nommée Marseille, de l'espace industriel de la République coloniale nommée France,
une partie de l'espace national de la Reconstruction et des Trente Glorieuses. Une ville orientée, un ensemble de quartiers populaires et vivants
situés au nord de Marseille et ses communes voisines. Se développent là
un savoir-vivre, un savoir-habiter ensemble, un face-à-face de pratiques
de l'histoire, de la mémoire et du récit : une hospitalité orale ; l'Hôtel du
Nord en est une expression. Réseau diffus de chambres et d'hôtes, il
raconte en la vivant la diversité de ceux qui passent et qui reçoivent. Sous
ce nom se cache aussi un programme d'édition dont ce livre est un des
épisodes. Placé dans chaque chambre, chaque livre cherche à retranscrire l'hospitalité du site dans lequel chaque hôte le trouve. Si habiter c'est
raconter, alors les récits de fondation sont autant d'outils de contextualisation nécessaires à notre vie en société : il ne peut y avoir de création
durable sans descendre au plus implicite récit collectif.