Plus de cinquante ans après sa sortie, Blowup reste un film dont l'audience et le pouvoir de fascination l'emportent sur les autres chefs-d'oeuvre d'Antonioni (L'Avventura, L'Éclipse, La Notte...). Ce film culte n'est-il pas le témoin décalé et ironique de son temps et le pourvoyeur d'interrogations éternelles sur le regard, la réalité, l'art, les relations entre les êtres, le besoin des objets ? Pour autant, l'hagiographie d'Antonioni aura généralement négligé l'extraordinaire réflexion plastique et la créativité visuelle qui font également de Blowup le lieu d'une « cinéplasticité » totalement maîtrisée et où l'image filmique ne cesse de s'entretenir avec l'histoire du cinéma, les champs de la philosophie et ceux des arts plastiques.
Ce livre propose donc une relecture inédite de ce film par une analyse approfondie de son déroulement narratif en rapport avec ses agencements visuels et sonores. Séquence après séquence. Cette approche permettra de rendre sensible le spectateur - le cinéphile comme le spectateur ordinaire - à la pluralité de formes et de sens qui fondent l'essence artistique de Blowup. Relayant l'analyse filmique, de nombreuses références viendront éclairer le propos d'Antonioni : oeuvres cinématographiques (Ford, Ozu, Misogushi, Bresson, Fassbinder, Godard, Hawks, Hitchcock, Ophuls, Sirk, Tati...) ou oeuvres plastiques (Carl André, Alberto Buri, Peter Campus, Le Caravage, Jan Dibbets, Marcel Duchamp, Piero della Francesca, Rembrandt, de Chirico, Mario Sironi...).
Blowup ressort ici comme un film où le dédale des fausses incohérences et la construction des images et du son incarnent une oeuvre unique en son genre, mais vouée peut-être à n'être jamais totalement élucidée. Loin d'en épuiser l'intrigue, cette étude n'en reste pas moins fidèle à la démarche d'Antonioni qui est d'engager son public à un exercice et une éducation du regard.