Les années 1915 et 1918 marquent l'histoire des chrétiens assyrochaldéens
et arméniens de l'Est de la Turquie et de l'Iran de dates
tragiques.
Ce livre retrace les événements, mais aussi les conditions qui
ont abouti aux massacres. Il explore la lente montée de la violence,
du Caucase à l'Anatolie orientale, et les tentatives des chrétiens pour
la conjurer. Il s'attarde sur la faiblesse des gouvernants iraniens,
sur l'arrivée au pouvoir des Jeunes Turcs et sur les revendications
nationalistes qui fragilisèrent la coexistence des populations composant
la mosaïque ethnique de la région. Il dénonce les agressions des empires
ottoman, britannique et russe et les traités inéquitables générateurs
de frustrations.
En 1914 les Assyro-Chaldéens étaient debout. Mais l'entrée en
guerre de l'Empire ottoman aux côtés de la Triple-Alliance plaça
le patriarche de l'Église d'Orient et les tribus assyriennes du Hakkari
devant un terrible dilemme. La décision patriarcale d'engager les tribus
aux côtés des Russes, au moment où les «Organisations spéciales»
ottomanes mettaient en action un plan d'élimination des chrétiens dans
la région, précipita les tribus dans un exode qui se commua en exil.
La barbarie des massacres (seyfo/saypa) de 1915 de part et d'autre
de la frontière irano-turque mit fin aux anciennes solidarités tribales
entre Assyriens et Kurdes ottomans ; les massacres perpétrés de nouveau
en 1918 et 1919 dans la région d'Ourmia hantent aujourd'hui encore
la mémoire des Assyro-Chaldéens ; ils firent vaciller la complicité
des populations d'Azerbaïdjan, sans parvenir à la briser totalement.
Alors que la présence assyrienne a disparu au Hakkari, les Iraniens
d'Ourmia et de Salmas, musulmans et chrétiens, ont su retrouver
au cours des années 1920 les clés d'une vie commune. La beauté
des chants et des liturgies de langue syriaque emplit de nouveau les
églises de la région.