Le cinéma ne vient pas de la peinture, et cependant
ce qu'il élabore comme pensée de l'image et de
l'art ne peut être restitué sans elle. Encore le
rapport de ces arts va-t-il bien au-delà des seuls
effets de présence de la peinture (biographie de
peintres, oeuvres citées, remplois de motifs et de
formes) dans les films. C'est un ensemble de savoirs
et de pratiques, de problèmes et de solutions que
le cinéma expérimente au contact de la peinture.
Comment passe-t-on de la peinture au cinéma ?
De l'impressionnisme aux frères Lumière ? Du XIXe
siècle au XXe ? Pour certains, le cinéma vient libérer
la peinture (É. Faure), pour d'autres, il s'apprête à
réussir là où l'opéra a échoué, en incarnant l'idéal
d'un art total (S. M. Eisenstein), pour d'autres
encore il accomplit une réforme majeure de l'idée
même d'art (W. Benjamin).
Ces thèses surgissent alors même que le cinéma
naissant et la peinture en crise affirment leur
fascination mutuelle ; c'est le début d'une intense
expérimentation croisée. Tout se partage. Des
problèmes de peinture sont explorés en cinéma
(H. Richter, V. Eggeling), des formes cinématographiques
passent dans la peinture de F. Léger
et de M. Duchamp, des cinéastes interviennent picturalement
sur le film (S. Brakhage).
Les approches que privilégie ce livre d'esthétique
sont autant de contributions à une histoire des images
et de l'art.