Penser le baptême de Clovis avec les
catégories qui sont les nôtres et voir dans
cet épisode la naissance d'une France
tout entière catholique dès le VIe siècle,
c'est commettre un anachronisme
majeur. En 496, aucune nation
n'émerge des ruines de la romanité, et la
conversion du roi et de sa garde personnelle n'entraîne pas
celle d'une Gaule qui reste pour longtemps religieusement
et ethniquement bigarrée, et dépasse largement le cadre
de la France actuelle.
Le baptême de Reims est néanmoins capital parce qu'il
met un terme à un siècle de désordres et d'invasions,
alors que l'unité romaine est rompue. En faisant le choix
du catholicisme qui prend la suite de l'universalisme
romain, en faisant fusionner les coutumes barbares et le
droit romain, Clovis combat les particularismes et permet
l'intégration, à égalité, des nouveaux venus.
Tout inachevée qu'elle fût à sa mort (511), son oeuvre fut
décisive. Et, s'il fallut après lui des siècles pour parfaire,
non sans rechutes, sa construction politique, c'est bien de
lui que procède la physionomie de l'Europe aujourd'hui.