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«Dieu, comment as-tu pu enchaîner les femmes alors que tu as accordé
une liberté sans bornes à ceux de ton espèce ? Est-ce que cela signifie que
Toi aussi tu défends les intérêts des hommes ? Toi et tes compères, vous
êtes tous des dieux n'est-ce-pas ? Il paraît que chez vous, chacun est l'égal
de l'autre, qu'il n'y a pas de favoritisme. Eh bien, c'est quoi, ça ? N'est-ce
pas le comble du favoritisme ? C'est Toi qui a créé la femme comme tu as
créé l'homme. Alors pourquoi as-tu fait un tel partage ? A eux le bonheur et
à elles, le malheur ?»
Cet échantillon de Comparaison entre les femmes et les hommes, évoque
parfaitement le ton, l'irrévérence et la colère qui animent Tarabai Shinde
lors de l'écriture de son essai. Elle n'y épargne rien ni personne et fait feu
de tout bois, des moeurs qu'elle observe, de la littérature qu'elle lit, de ses
propres expériences. S'adressant aux hommes (parfois aux dieux) elle décrit
le sort inique qu'ils ont réservé aux femmes en cette fin du 19e siècle en
Inde. Elle montre que cette sous-humanité féminine est tout autant
culturellement construite que la surhumanité masculine qui l'écrase. C'est
un électrochoc qu'elle tente d'appliquer à ses lecteurs en dénonçant leur
imposture, en rétablissant la dignité des femmes et en plaidant pour des
droits égaux entre les uns et les autres. Certes, nous sommes en Inde, et le
contexte civilisationnel est bien différent du nôtre. Mais ce cri de liberté
d'une femme en colère peut et doit être entendu par tout le monde.
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