De la difformité
Deformity : An Essay de William Hay, paraît à Londres en 1754. Traduit ici en français pour la première fois, c'est l'un des premiers récits autobiographiques consacrés à la difformité. Les traités sur le sujet ne faisaient cependant pas défaut depuis le XVIe siècle, les anatomies étranges et les corps monstrueux peuplaient alors les ouvrages médicaux, les cabinets de curiosités et les tréteaux des foires. Le propos de cet ouvrage est tout autre : comment la difformité, exposée aux regards de tous, est-elle vécue par l'individu difforme ? William Hay, bossu et de petite taille, était bien placé pour répondre à cette question. Il le fait en scrutant l'emprise du regard sur ces corps anormaux, analyse le ridicule et le mépris qui les accompagnent, la honte de celui qui les ressent, et les stratégies qu'il lui faut alors développer pour tenter de s'y soustraire. Ce récit n'est cependant pas une plainte, mais se transforme en un éloge paradoxal de la difformité. Il fait apparaître les recours possibles contre ces tyrannies du regard, et les avantages insoupçonnés que les individus difformes peuvent alors y trouver. Le traité de William Hay ouvre ainsi, au milieu du XVIIIe siècle, l'espace intellectuel et moral du souci de ce qui se trouve aujourd'hui au coeur des disability studies.