Ce livre est une réflexion sur l’intégration et l’identité nationale, en France et plus généralement en Europe. Traduction d’un ouvrage paru d’abord en anglais en 1993, il analyse la manière dont se constituaient les nations et se forgeaient les identités, à la fois sous et contre l’influence de forces émanant des capitales des États et de leurs élites politiques. Devenu classique, ce livre a eu un impact intellectuel considérable depuis un quart de siècle dans les mondes anglo-saxon et français. La théorie de la modernisation, illustrée notamment par l’ouvrage d’Eugen Weber, La Fin des terroirs (1870-1914), ne prenait pas suffisamment en compte la façon dont ces identités étaient façonnées par des conditions locales et des allégeances régionales, dont celles de la langue. Caroline Ford a réussi à remettre en question cette perspective et a montré comment les hommes et les femmes dans un département de Basse Bretagne (le Finistère) s’étaient opposés à un État qui, à la fin du xixe siècle, s’efforçait d’intégrer ces régions dites périphériques à une culture politique commune. Elle analyse les stéréotypes fortement péjoratifs qu’utilisaient les représentants de l’État et les observateurs, afin de contester ce que l’on a qualifié de « l’énorme condescendance de la postérité », en attribuant indépendance, rationalité et humanité aux Bretons des campagnes et des villes, vivant très loin de la capitale.