DISPOSER DE SOI ?
A partir d'une analyse du corpus que constitue le discours doctrinal
juridique relatif à la question des rapports de la personne à son corps, ce
travail développe une double analyse. Il souligne en premier lieu l'existence d'un décalage important entre la substance de ce discours doctrinal et la réalité du droit positif qu'il prétend décrire. L'auteure s'interroge alors sur les raisons de ce décalage et suggère que la doctrine ne se place pas exclusivement sur le terrain traditionnel de la validité juridique formelle, mais emprunte également parfois à des conceptions plus empiriques ou axiologiques de la validité.
En second lieu, et alors même que la doctrine affirme, dans une quasiunanimité, l'existence d'un « droit de la personne à disposer de son
corps », l'auteure met en évidence que les normes juridiques intervenant
sur le terrain des rapports de la personne à son corps (refus de soins, prélèvements d'organes, maternité de substitution...) sont bien plus des
normes restrictives, voire prohibitives de certains usages du corps qu'elles ne consacrent des droits nouveaux au profit de la personne. En cela, la définition juridique des rapports de la personne à son corps semble révéler la constitution progressive d'un ordre public corporel bien plus qu'elle ne participerait d'un mouvement plus généralement diagnostiqué d'inflation des droits subjectifs.