Des années 1980 à 2000, la pièce monologuée est très présente sur
la scène française. Cet ouvrage montre comment ce phénomène artistique
trouve sa nécessité dans le besoin d'explorer une forme qui travaille la
relation directe acteur/spectateur. L'autre toujours présent dans la salle, l'est
aussi dans la parole même du monologueur qui incorpore à lui-même une
forme d'altérité absente. La dramaturgie de cette pièce monologuée
s'élabore en étudiant d'abord l'adresse, qui va de l'adresse à un élément
concret à l'adresse abstraite qui joue avec la frontière de la fiction. Le lien
à l'autre est ensuite observé dans le récit qui le met en scène, à travers le
système des paroles rapportées. Le monologue se définit ainsi comme le
théâtre mental d'un personnage immédiat peuplé de multiples présences de
l'autre fantasmées, le traitement du temps et de l'espace y trouvant des
caractéristiques propres. Cette étude dessine, malgré l'hétérogénéité des
pièces abordées, un tableau du monologue de la fin du XXe siècle qui met
moins en scène un personnage en déroute, qu'une voix qui tente de
reconstruire une identité qui lui manque par un récit toujours incertain.
Cette difficulté fait du personnage de la pièce monologuée contemporaine
une figure spectrale, divisée entre l'immédiateté de son discours et un passé
qui ne cesse de faire retour, sans jamais être retrouvé.