La respiration est au coeur de toutes les pratiques chinoises
consacrées à l'Art de nourrir la vie (Yang Sheng). Pourtant, sa
physiologie demeure l'une des plus mal connues dans sa version
énergétique d'origine.
En médecine chinoise, le respir est conçu comme une synthèse
naturelle, mouvante et intimement vécue de tous les niveaux
d'activité et d'échange énergétiques et psychiques qui fondent
l'individu conscient dans son corps, en dialogue avec le monde.
Les trois foyers métaboliques - thoracique (coeur et poumons) épigastrique
(rate-estomac) et abdominal (reins et foie) - produisent
les énergies vitales et constituent en même temps l'axe central de
propagation des mouvements respiratoires.
Par l'enracinement vital de l'inspir, le dénouement créateur de l'expir
et la conscience immédiate et spatiale de soi dans l'intervalle libre des
poses respiratoires s'organisent le tissage et le détissage dynamiques
dont découlent l'identité corporelle et celle de la pensée.
Entre énergies circulant dans les méridiens et mouvements respiratoires,
la continuité et la cohésion sont immédiates et totales.
Les systèmes complémentaires du Maître du Coeur (Xin Zhu) au
centre du thorax et du Triple Réchauffeur (San Jiao) dont l'axe est
enraciné au centre du bassin, semblent intervenir conjointement
aussi bien dans la respiration individuelle que dans l'échange spécifique
que constitue la relation sexuelle.
A travers le jeu des «trois foyers», le ciel, créateur et libre de toute
forme, révèle à la terre qui lui répond en se tenant dans sa forme,
l'indicible qui la sous-tend et dont le secret s'ouvre dans le coeur de
l'homme.