Exister par écrit
Naître et mourir, des événements ordinaires qui s'inscrivent dans des registres officiels. Quelle est la portée pour chacun de nous de cette écriture officielle produite par un système d'état civil ? Doit-elle donc offrir une pleine traçabilité personnelle assurant une totale transparence des liens biologiques, sociaux, juridiques ? Jusqu'où peut et doit opérer cette écriture officielle ? Que recouvre une officialité conçue comme garantie d'État ?
Ces inscriptions d'état civil contraintes sont aussi protectrices et sources de droits. Il se pourrait cependant que l'obsession de la trace et de la transparence participe d'une confusion montante entre traçabilité et identification, confisquant la lente élaboration des histoires personnelles, familiales, collectives tout en sacralisant origines et racines.
L'intention est d'explorer quelques facettes de cette écriture officielle de l'état civil sur les terrains de la sociologie, mais aussi à travers une histoire singulière, celle d'une femme qui refusa de se faire connaître au siècle dernier et qui réussit si bien qu'elle ouvrit à ses fille et petite-fille le champ des possibles, une forme d'état incivil. Celui-là même exercé, comme par ironie, par le peuple grandissant et âgé des troublés de la mémoire et de toutes les filiations.