Il s'agit d'une série de lectures de la lecture, « cette pratique », disait Mallarmé, encore au fond si peu pratiqué, encore si mal comprise. ? travers une grande diversité d'occasions et de prétextes, les textes réunis ici s'efforcent tous de relever dans les textes lus (que ce soit Bataille, Derrida, Quignard, Cixous ou encore la critique littéraire ou la philosophie universitaire) un rapport spécifique à la lecture elle-même, si quelque chose de tel existe. Car du moment où la lecture est plus et autre chose que déchiffrement, commentaire, voire interprétation (trois manières d'éviter ou de contourner la lecture), du moment donc où elle affleure en tant que telle, on se trouve face à de l'illisible. Comme le savent très bien au moins certains des auteurs lus ici, lire au sens fort du terme implique toujours qu'on s'affronte, dans la nuit, à ce qu'on n'arrive pas à lire, alors que toutes les disciplines et institutions de la lecture s'emploient à dissiper cette nuit, à y mettre fin, quitte à perdre de vue leur propre condition de possibilité. On essaie donc ici de s'approcher au plus près de cet illisible, seule source ou ressource de la lecture elle-même, seule raison d'être, à chaque fois singulière, des mêmes disciplines qui ne vivent que de l'éviter.