Vues de près, les peintures antiques de la villa Adriana à Tivoli,
les fresques de Raphaël au palais du Vatican, mais aussi celles
de la galerie des Carrache dans le palais Farnèse, et tant d'autres,
offrent un spectacle étonnant. Ce sont des oeuvres striées de noms,
de dates et même d'esquisses, très différentes des images lisses,
intactes et éclatantes auxquelles les livres d'art nous ont habitués.
Les graffitis y sont omniprésents. Ils furent réalisés par des artistes
parfois célèbres, au cours de leur période de formation à Rome, par
des amateurs lors du Grand Tour, par des soldats ou des touristes
de passage à Rome entre les XVIe et XIXe siècles.
Ces graffitis nous mènent au coeur de la tradition artistique européenne
et occidentale. Apposés sur des oeuvres majeures, ils sont
la survivance de gestes d'empreinte, d'attestation et d'inscription,
de signatures et d'écritures individuelles. Trace urbaine griffant les
hauts lieux de Rome, le graffiti manifeste un rapport matériel et
familier aux oeuvres.
Ce livre invite à un autre regard sur l'art et son histoire : non pas
esthétique mais archéologique ; un regard de biais, littéralement.
Ainsi rendus à leur visibilité, les graffitis donnent à voir une autre
histoire du chef-d'oeuvre, matérielle, tactile et anthropologique.