«S'il est vrai que le noyé revoit en quelques secondes le film intégral de sa
vie, le surréalisme a été le dernier rêve de la culture qui sombre.»
Écrite vers 1970 à la demande d'une maison d'édition française
qui projetait de la publier dans une collection destinée aux lycéens,
l'Histoire désinvolte du surréalisme fut rédigée en une quinzaine de jours.
La collection ayant été abandonnée, le manuscrit me fut restitué.
Le texte a les mérites et les inconvénients de la spontanéité. Le
pseudonyme choisi, Jules-François Dupuis, concierge de l'immeuble
où mourut Lautréamont et signataire de son acte de décès, dit assez
que l'ouvrage participe essentiellement de ces divertissements érudits
où l'on prend plaisir à se dissiper.
Il n'est pas dénué d'agressivité, de partialité, voire de mauvaise foi
(mais une foi ne peut être que mauvaise). Si le ton polémique porte la
marque archaïque d'une époque où il était de bon ton de mordre en
argumentant, je revendique en revanche sa partialité.
Bien que les situationnistes n'aient pu empêcher l'idéologie
situationniste - le situationnisme - de se répandre en remugles de
mondanité, la radicalité de leur pensée demeure intacte et poursuit
son chemin. De même, le noyau qui rayonna de l'expérience vécue
par les dadaïstes et les surréalistes n'a rien perdu de son caractère
infrangible. Il continue à frapper de dérision les foires mercantiles de la
récupération, il dévaste de son rire inextinguible les champs d'opium
culturel où broutent ceux qui n'ont d'existence que par l'esprit, et
dont tirent profit les gens de pouvoir et les prédateurs en tous genres.