Hunter S. Thompson (1937-2005) est devenu un mythe de
son vivant, comme d'autres écrivains américains avant lui - Twain,
Hemingway, Mailer, Kerouac, Burroughs, Capote - avec lesquels il
avait en commun cette propension peut-être typiquement américaine :
transformer la littérature en spectacle et le spectacle en littérature.
Poussant cette logique jusqu'au délire, chargé d'alcool et de drogues, ne
respectant que ses propres règles, se mettant lui-même en scène dans
des reportages épiques et férocement drôles, notamment pour le magazine
Rolling Stone, il a inventé une forme de journalisme hors-la-loi :
le Gonzo.
En trois livres - le récit de sa vie avec un gang de motards (Hell's Angels),
une virée à Las Vegas à la poursuite du Rêve Américain (Las Vegas
Parano) et son compte rendu au jour le jour de la réélection de Richard
Nixon (Fear and Loathing : On the Campaign Trail '72) - il a donné voix
et sens à l'effondrement des idéaux de la jeunesse des années 60. Son
influence sur les générations suivantes d'écrivains et de journalistes
est colossale.
Héros littéraire, considéré par ses lecteurs à l'égal d'une rock star, mais
de plus en plus retranché dans son ranch du Colorado - il a continué
à bombarder inlassablement l'époque, les médias et ses nombreux correspondants
de brûlots au style inouï, jusqu'à son suicide par revolver
le 20 février 2005.
Aujourd'hui, le «mythe Hunter Thompson» est l'objet d'adaptations au cinéma :
Les Vegas Parano de Terry Gilliam, avec Johnny Depp, et bientôt The Rum
Diary, toujours avec Johnny Depp.
Une biographie de grande ampleur s'imposait, capable de faire la part
entre l'homme, l'écrivain et le personnage. C'est le défi qu'a relevé William
McKeen. Comme l'écrit Philippe Manoeuvre dans sa préface : «Le livre que
vous allez lire est captivant, fascinant, bien documenté (y compris sur ce
qui n'est pas sorti et n'a pas été écrit) et surtout relativement détaché.
Pas facile de le rester en écrivant sur ce Hunter Thompson qui continue
d'exercer une destructrice fascination sur sa descendance.»