La chanson de geste, pour le grand public, c'est la grandeur tragique et hiératique de la Chanson de Roland. Longtemps les spécialistes eux-mêmes ont subi cette fascination du chef-d'oeuvre, rejetant toutes les chansons postérieures dans le marécage de la décadence.
Jehan de Lanson, vers 1240, porte le témoignage d'une autre esthétique, fondée sur la bonne humeur, l'artifice, l'illusion. Cette perspective, nouvelle dans ses modalités, entraîne-t-elle une rupture avec les traditions du genre ? A-t-elle pour effet de placer cette chanson en marge de la production épique et de ses préoccupations habituelles, idéologiques par exemple ? Jusqu'où vont les transformations de l'écriture ?
En explorant tous les procédés mis en oeuvre, on découvrira que Jehan de Lanson est inséparable du genre, inexplicable sans lui, et on mettra en lumière les ressources qu'offraient aux poètes les jeux intertextuels, l'ironie, la simulation du tragique. Le trouvère, ici, ne jouerait-il pas avec un genre en pleine mutation ?