La Junte militaire qui depuis 1974 détient le pouvoir en Ethiopie a poursuivi une politique d'Etat identique à celle des monarques qui l'ont précédée. Le centralisme est de rigueur et les nationalités ont le plus grand mal à conserver des traditions dont le destin est de se fondre dans une société marxiste-léniniste certes nouvelle mais dont le véhicule culturel est toujours amhara.
Bien que depuis plus de quinze ans oppositions politiques et revendications nationales n'aient jamais cessé de défier le Gouvernement, ce n'est qu'en mai 1991 que les fronts armés réussissent à s'emparer d'Addis Abäba, la capitale éthiopienne. Quand se produit l'effondrement du régime, il y a quatre années à peine que le lieutenant-colonel Mängestu Haylä-Maryam est parvenu à doter le pays de structures identiques à celles des autres pays membres du camp soviétique. Mais pendant cette courte période, de la proclamation de la République à la chute d'Afabét, de la tentative de coup d'Etat manqué à la perte du port de Massaoua, du désengagement des pays de l'Est à la déchéance du régime, les armées éthiopiennes, lasses et décimées, n'ont connu que l'échec face aux combattants aguerris et motivés des fronts.
Reste que d'un point de vue planétaire, l'événement est fondamental, à la fois transitionnel et liminaire de l'histoire d'un monde débipolarisé, d'un continent renvoyé par ses anciens mentors à des solutions indigènes, d'une Afrique abandonnée à ses propres démons.
Quant à l'Ethiopie, fidèle à un grand mouvement alternatif de son histoire, elle remet une fois encore sa destinée entre les mains des gens du Nord. Cette fois-ci cependant la paix aura un prix : la perte de l'Erythrée.