La civilisation Islamo-Chrétienne
Les relations entre l'Occident et le monde arabo-musulman depuis la fin de la Guerre froide ont été largement déterminées par un modèle catastrophiste fondé sur la thèse du « choc des civilisations ». De Bernard Lewis à Samuel Huntington, des générations de chercheurs américains n'ont vu et souligné que l'aspect conflictuel des rapports entre ces deux régions du monde.
C'est une tout autre histoire qu'écrit ici Richard W. Bulliet. S'appuyant sur deux arguments forts, il vise à saper les thèses qui ont servi de support idéologique à l'administration américaine pour ses interventions dans le monde arabe, et notamment en Irak. D'une part, contre l'histoire d'une continuelle opposition, il réconcilie l'Occident et le monde arabo-musulman en les présentant comme les deux branches, culturellement proches, d'une même « civilisation islamo-chrétienne ». D'autre part, il réfute l'idée d'un islam essentiellement archaïque et intégriste qui ferait obstacle à tout progrès politique et social : l'islam qui a accompagné l'histoire moderne du monde arabe est un islam pluraliste et progressiste, au sein duquel les « fous d'Allah » ne sont que des marginaux. Au lieu d'un choc des civilisations, Bulliet croit donc à la possibilité d'une coexistence entre les deux régions et à l'émergence de régimes politiques démocratiques en lien avec un islam modéré.