J'arrive de Tokyo. Retour dans le caveau familial.
Je ne suis qu'amour et j'ai un petit mot gentil pour
tout le monde. Le radiateur du couloir, le placard
encastré, le clou auquel j'accroche mon trousseau de
clefs. Je suis quelqu'un de très organisé. Un compliment,
une caresse, pour moi ce n'est pas grand-chose,
pour eux c'est tellement important. Je suis accueilli
en héros. Je suis le seul dans cette maison à entrer et
sortir avec une sorte d'autonomie parfaite, cela force
le respect.
Dans la cuisine, c'est une autre paire de manches.
Dès que j'arrive, le frigo se met à râler. Si j'en crois
la cafetière électrique, il est très sympa quand je ne
suis pas là, mais dès que je reviens, crac, il me fait
payer le prix de mon absence. Il sent ma culpabilité et
il en rajoute. Heureusement que le four micro-ondes
est moins irascible parce que je ne sais pas si je pourrais
supporter cette ambiance délétère chaque fois
que je rentre de voyage. Quand on est musicien, on
bouge, c'est normal. On ne joue pas une symphonie
de Beethoven seul sur son canapé.