«[...] nos études d'histoire de la philosophie du droit ne cessent de nous
mettre en présence des liens directs - je dirai plutôt de la dépendance du plus
petit fait de l'histoire du droit [...] à l'égard de la métaphysique.» (M. Villey,
ce livre, p. 193).
Servi par une connaissance rare et vivante du latin, nourri de lectures
nombreuses, difficiles et souvent peu répandues, doté d'une science sans
équivalent des grandes oeuvres scolastiques de saint Thomas à Suarez,
riche, comme par héritage, des savoirs seiziémistes de son père, Pierre
Villey, grand spécialiste et insurpassable éditeur de Montaigne, très bon
connaisseur de quelques grands anciens et de quelques grands modernes,
d'un certain nombre de moindres auteurs aussi, juriste solide et singulièrement
romaniste, fort, encore et surtout, d'une puissante pensée personnelle
propre à faire revivre ; sur le mode d'un mythe impressionnant et persuasif, un
monde de controverses ensevelies et pourtant toujours présentes, Michel
Villey était le seul à pouvoir donner une telle oeuvre. Nul aujourd'hui ne
saurait le faire avec une telle élégante puissance.
Plus encore : dès lors qu'il s'agit de certains auteurs et de certaines questions,
il ne peut qu'être hasardeux de supposer Michel Villey insuffisamment
informé, lors même qu'on ne le suivrait pas dans une décision interprétative.
Pourquoi publier ces cours, déjà anciens ? Pas par fidélité : la fidélité peut
inciter parfois à ne pas publier. Pas pour rendre justice à un homme de très
grande qualité : il attendait tout d'une autre justice que la nôtre. Pour l'amour
de la grande pensée, plus excitante encore lorsqu'elle se donne à voir, affrontée
aux plus difficiles enjeux, dialoguant avec les oeuvres maîtresses de notre
tradition philosophique, travaillant sur elle-même, vivante, rendue plus belle
encore dans le don superbe de l'enseignement.
Stéphane Rials