La genèse de l'État moderne est le fruit d'une lente
évolution à partir de la seconde moitié du XIIIe siècle, qui
a d'abord affecté les monarchies féodales d'Occident : il y
a quelques années, elle a fait l'objet d'études systématiques
de nombreux historiens en Europe, grâce au CNRS et
à la Fondation européenne de la Science. Le présent
ouvrage est une étude de cas, consacrée à l'Angleterre, à
bien des égards la plus précoce et la plus cohérente des
constructions politiques médiévales qui, paradoxalement,
est peu étudiée par les historiens français.
On y retrouve le primat de la guerre et de la fiscalité
dans la dynamique de la genèse de l'État moderne, ainsi
que la mise en place d'un système judiciaire garantissant
la reproduction de la classe dominante dans des conditions
satisfaisantes. Mais l'ouvrage permet surtout de relever
et d'articuler la corrélation entre le développement et
la vitalité de la société politique, dont l'existence est une
condition sine qua non pour l'État moderne, et la mutation
de la culture et du système de communication
médiéval, tant au niveau des médias et de la langue qu'à
celui des types de textes produits.
Par l'analyse de plus de 2 200 bio-bibliographies
d'«auteurs» actifs dans les domaines de l'histoire et du
politique, et au moyen d'une théorie des champs de
production textuelle, se dégage ce qu'a été l'idéologie
spécifique du féodalisme d'État. Alors naissent progressivement
les catégories modernes du politique, ainsi que la
notion d'une société politique «nationale».