Dans ce traité, resté inédit de son vivant, Vauvenargues reprend
à nouveaux frais l'éternelle question du libre arbitre. Le verdict
est formel : la liberté individuelle n'est qu'une illusion gratifiante !
L'homme, parce qu'il est avide d'agir, s'imagine libre de faire
ce qu'il veut, oubliant au passage sa dépendance foncière à
l'égard de la nature. Loin d'être autonome, la volonté obéit
à son insu aux injonctions contradictoires des désirs. Les
sentiments et les pensées se bousculent en nous hors de tout
contrôle conscient.
Avant Freud, Vauvenargues montre ainsi que le moi n'est pas
maître dans sa propre maison. Une stricte nécessité gouverne
notre corps et ce que nous appelons liberté se réduit au fait de
suivre docilement les «lois de notre être». Plutôt donc que de
se rêver acteur de son destin, il faudrait accepter l'idée qu'on
est un simple jouet de la nature. Mais un jouet consentant
et heureux !