Née dans les années quatre-vingt en Italie septentrionale, la Ligue du Nord, parti régionaliste, a réussi par deux fois à accéder au pouvoir dans des gouvernements de coalition, et ce alors même qu'elle remet en cause la notion d'Etat italien.
A première vue, ce «séparatisme à l'italienne» peut être interprété comme le fruit de la crise politique qui a conduit à l'effondrement de la Première République italienne et de la bipolarisation Démocratie Chrétienne - Parti Communiste. Mais, si elle est un acteur évident de ces transformations récentes, la Ligue du Nord tire ses racines d'une réalité bien plus ancienne, celle d'un échec partiel du processus d'unification de la Nation italienne.
La spécificité de la Ligue du Nord, et partie de son succès, découle d'un discours politique nouveau dans un espace marqué par le refoulement de l'Unité, à savoir un discours axé sur les notions de territoire et d'identité. Ce discours sur une Nation imaginée, la Padanie, favorise un processus d'affirmation et d'invention d'une identité spécifique à l'Italie septentrionale. Le territoire de la Padanie sert à formuler un discours ethnique et raciste quand la Ligue du Nord revendique la sécession. Parallèlement, ce même territoire est défini selon des critères socio-économiques lorsque la Ligue du Nord adopte la ligne du fédéralisme.