Les débats qu'ont suscité les questions de bioéthique, les unions entre personnes de même sexe, la gestation pour autrui, la famille monoparentale, l'adoption, ou encore la transmission du nom de famille, ont pris en France une tournure tout à fait particulière. En effet, là où ailleurs ce sont la morale, la religion ou la « nature » qui sont volontiers mobilisées, ce sont bien plus souvent certains des concepts les plus ardus de la psychanalyse et de l'anthropologie structurale qui sont invoqués en France. Comment expliquer, par exemple, que l'opposition au Pacs ait pris appui sur Lévi-Strauss et Lacan pour défendre une conception hétérosexuelle de la famille et de la différence sexuelle - érigées en véritables nécessités culturelles, en prolongement incontournable des valeurs républicaines ?
Au carrefour de l'histoire intellectuelle et de l'histoire politico-juridique, La loi de la parenté se propose d'examiner en quoi les discours savants sur la parenté ont rencontré et influencé les discours politiques sur la famille. L'ouvrage revisite aussi bien les textes que les contextes qui ont suscité ces étonnants rapprochements entre anthropologie, psychanalyse et droit de la famille en France. Particulièrement attentif aux experts et aux intermédiaires qui ont contribué à la diffusion des idées, mais aussi à leur détournement à des fins politiques, ce livre permet de démêler et d'interroger les liens enchevêtrés entre concepts savants et idées politiques.